Malgré ses 8.500 tonnes, l’ancien croiseur lance-missiles de la Marine nationale, le Colbert, semble bien petit au fond de l’immense cale sèche du Grand port maritime de Bordeaux, à Bassens, où il disparaît progressivement sous les assauts des pinces-coupantes et des chalumeaux. Après avoir été désamianté, le navire a été placé en novembre 2017 dans cette forme de radoub de 15 mètres de profondeur sur 240 mètres de long et 35 m de large, pour l’étape finale du chantier de démantèlement : la découpe.
C’est une petite équipe qui s’active à cette tâche somme tout délicate. Les ouvriers sont obligés de porter des masques respiratoires autoventilés pour se protéger des émanations toxiques qui pourraient survenir.
Acier d’un côté, cuivre, inox ou laiton de l’autre, sont triés. L’acier est revendu à des fonderies locales et expédié par bateau.
Ce navire militaire est le second ainsi recyclé à Bordeaux par l’entreprise Veolia, après l’ex-Jeanne d’Arc, le célèbre navire-école de la Marine. Alors que la majorité des navires sont encore démantelés en Asie du Sud-Est, ce chantier est emblématique de la nouvelle filière qui se met en place en France et en Europe pour recycler les navires en garantissant la sécurité des travailleurs et le respect de l’environnement. A ce jour trois sites ont été agréés en France par l’Union européenne et seul le Grand port maritime de Bordeaux peut accueillir des navires de plus de 150 mètres de long.
Long de 181 mètres sur 24 de large, le Colbert pouvait transporter jusqu’à 2400 hommes. Construit dans les années 50, il transporte le Général de Gaulle jusqu’au Québec en 1967, où le président français lance son fameux « Vive le Québec libre ! ». Après une dernière mobilisation pendant la guerre du Golfe en 1991, le croiseur est désarmé en 1992 et devient un navire-musée de 1993 à 2007 sur le quai des Chartrons à Bordeaux. Après un long détour par la Bretagne – 8 années passées dans le cimetière pour bateaux de Landevennec – l’ex-Colbert, devenu la coque Q 683, est revenu sur les bords de la Garonne pour être démantelé. Le chantier devrait s’achever au début du printemps 2018.
D’autres navires de la Marine attendent un sort identique.
Photos : © Jean-Bernard Nadeau / LookatSciences