Un papillon arrimé à un petit robot roulant de plusieurs centaines de grammes entreprend de remonter un flux de phéromones. A chaque changement de direction de l’animal, le cyborg suit le mouvement, tout en enregistrant l’activité électrique des antennes.
Voici l’une des expériences en cours au laboratoire « Physiologie de l’Insecte, Signalisation et Communication » (PISC) de l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA). Elle vise à comprendre les stratégies mises en oeuvre par les insectes pour remonter les panaches odorants, dans leur quête de nourriture ou de partenaires sexuels. Des effluves qui, prises en permanence dans des turbulences atmosphériques, conduisent à des signaux discontinus, dilués et sporadiques. Difficile de s’y retrouver ! Et pourtant « une mite peut parvenir à trouver un partenaire sexuel à plusieurs centaines de mètres de distance, en quelques secondes à peine », rappelle Philippe Lucas, responsable de cette recherche au PISC.
Les chercheurs rêvent de pouvoir développer des robots qui seraient aussi efficaces pour remonter les odeurs jusqu’à leur source. Détecter des fuites chimiques dans les installations industrielles à risque, rechercher des traces d’explosifs sur les champs de mines, intercepter des substances illicites, déceler des composés volatiles issus de cellules cancéreuses, le champ des applications semble sans limite.
Une publication de cette recherche menée en collaboration avec le Laboratoire Lorrain de Recherche en Informatique et ses Applications (Journal of Visualized Experiments, sous presse) fait déjà la démonstration de la capacité technique de leur robot à enregistrer en temps réel les signaux électriques le long des antennes de l’insecte et à les corréler aux concentrations observées de phéromones.
C’est par la connaissance approfondie du comportement olfactif des insectes que passera notre capacité à profiter de leur exceptionnelle sensibilité aux odeurs.
Vincent Gaullier
Photos © Patrice Latron / LookatSciences